Pleurs.

Publié le par Emmanne

Sensation de me remettre à penser.

Même si le train des pensées m’emmène une fois sur deux vers Emmanuelle.

Je pense aussi à ce que je dois faire. Le futur de nouveau existe. Je sors de ma bulle.

L'anesthésie et le verrouillage cèdent.

Sensation de quitter le mode PAUSE où je sombre dans les jours qui encadrent LES dates des jours de sa mort ...avant, après...Mécanisme de protection involontaire.

Cueillie au lever par une vidéo et un article postés par une copine deuilleuse.Je pleure comme jamais.

"Soit on se défend, soit on se laisse pénétrer". Je me sens fragile et vulnérable, les émotions entrent en moi si facilement... Vertige de la peur de l'effondrement et de la liquéfaction...

Envie de la remercier pour ce moment hors du temps qu'elle a partagé et les larmes bienvenues qu'elle a permis.

Entrer dans la danse.C'était pendant longtemps le seul moment où mon cerveau sortait de la boucle infernale:

"mafillestmortec'estpaspossiblenonnonnonpasellecommentjevaisfairepourquoiçam'arriveàmoiàElle..."

et c'était du rock aussi.Et je souriais vrai.

La journée n'est pas finie et j'ai déjà beaucoup pleuré pour quelqu'un qui ne pleure jamais. Presque.

Pourquoi la danse en solitaire du compagnon d'Agnès Lassalle devant son cercueil nous touche autant
Par Ophélie Ostermann Publié hier à 16:14 , Mis à jour hier à 16:38. figaro madame.

Sur la chanson Love de Nat King Cole, Stéphane Voirin a dansé pour rendre un dernier hommage à sa compagne Agnès Lassalle, tuée le 22 février dans son lycée. Les images ont provoqué une vive émotion. Deux spécialistes analysent les causes.

Ces pas de danse marqueront l'année 2023, affirment certains. Ces pas, ce sont ceux de Stéphane Voirin, le compagnon d'Agnès Lassalle, professeure de 53 ans mortellement poignardée par un de ses élèves, dans sa classe du lycée Saint-Thomas-d'Aquin à Saint-Jean-de-Luz, mercredi 22 février. C'est ainsi que l'homme a rendu un dernier hommage à sa compagne, sur le parvis de l'église Sainte-Eugénie de Biarritz, après la cérémonie d'enterrement vendredi 3 mars. Droit devant le cercueil, il a entamé des pas de danse seul, porté par la chanson Love, de Nat King Cole. L'homme a ensuite été rejoint par de multiples duos qui ont dansé à leur tour.

Filmée par les caméras de la presse postées devant l'église, la vidéo a été partagée en masse sur les réseaux sociaux et dans les médias. De la «grâce», «un moment d'humanité», «une leçon de dignité»… Dans la presse et sur les réseaux, la vidéo a frappé et ému le plus grand nombre. Beaucoup ont exprimé de l'admiration, loué un instant de vie dans la mort, de la légèreté dans la gravité. Si cet hommage émeut tant, c'est parce qu'il étonne, parce qu'il surprend. «Face à la surprise, nous réagissons de deux façons différentes, précise Dominique Picard, psychosociologue (1) : soit on se défend, soit on se laisse pénétrer. Et dans ce second cas, on s'identifie aux personnes en train d'agir.» À la vue de la posture de Stéphane Voirin, de sa dignité, de son attitude aimante appuyée par son baiser déposé sur le cercueil, le spectateur entre en empathie avec cet homme endeuillé par la perte de sa compagne. Il se projette aussi. «Durant les enterrements, l'émotion peut survenir par identification, les obsèques réveillent en nous la peur de perdre quelqu'un», ajoute la psychosociologue.
Dire avec le corps

La danse rend aussi cet hommage tout à fait singulier et particulièrement émouvant. D'abord parce que les mouvements du corps de Stéphane Voirin, aériens, instillent de la joie et de la douceur dans un contexte d'assassinat d'une extrême violence. Ensuite parce que le geste vient faire honneur à ce qu'était la défunte. Agnès Lassalle et Stéphane Voirin dansaient, souvent et depuis longtemps. «On s'est rencontrés sur une piste de danse, en 2010», confiait-il le 25 février dans une interview au journal Sud-Ouest . «Le symbole est fort, commente Dominique Picard, l'homme danse seul parce qu'il a perdu sa partenaire, il danse avec son image, avec son souvenir, quand celles et ceux qui le rejoignent dansent tous en couple.»

    Le symbole est fort, l'homme danse seul parce qu'il a perdu sa partenaire, il danse avec son image, avec son souvenir, quand celles et ceux qui le rejoignent dansent tous en couple
    Dominique Picard, psychosociologue

L'art même de la danse touche aussi au-delà des mots, selon la psychosociologue. Dans cet hommage, elle dit avec la musique et le corps ce que les discours - et donc le langage - disent parfois aux enterrements : la mort fait partie de la vie. Les paroles de la chanson de Nat King Cole, en français aux obsèques d'Agnès Lassalle, appuient la déclaration d'amour de Stéphane Voirin à sa compagne et participent à l'émotion. «On peut par exemple entendre “je ne partirai pas”, que l'on peut comprendre comme un “je vais rester avec toi” ou “tu ne seras jamais loin de moi”», avance Dominique Picard.
Des réactions en lien avec notre conception de la mort

Si une écrasante majorité de réactions a salué la beauté de la forme revêtue par l'hommage, certains commentateurs ont exprimé une gêne. «Je trouve ça très étrange de danser à un enterrement», «Les pires douleurs sont muettes. Quand on souffre d'un décès on ne se livre pas à de pareilles fantaisies», peut-on lire sur Twitter. Ces réactions sont liées à notre conception de la mort. Dans notre culture, elle doit être triste, grave. On ne rit pas, on ne parle pas pendant un enterrement, on doit être digne. Alors pour certains, danser à côté d'un cercueil est incompréhensible. Encore davantage dans un contexte aussi dramatique que celui de la mort d'Agnès Lassalle. Il n'y avait pourtant aucun sourire sur les visages des danseurs durant l'hommage.

D'autres - une minorité - sont allés jusqu'à y voir une insulte, un manque de respect. «Dans toutes les civilisations, le respect existe dans la mesure où il se manifeste. Le seul moyen de signifier que l'on respecte quelqu'un est de le montrer, et pour ce faire, on utilise les codes de la culture. Ici, l'hommage sort des codes, et pour certains, du respect», ajoute Dominique Picard.

    Pour certains, il est inenvisageable d'allier l'expression d'émotions liées à un moment joyeux à un temps d'hommage
    Sarah Dumont

En matière de comportement aux funérailles, une forme de norme à laquelle il faudrait se conformer pèse encore lourd, souligne de son côté Sarah Dumont, fondatrice du site Happy End , un «site compagnon pour mieux vivre la mort et le deuil», qui, plus précisément, accompagne dans la préparation de son départ, dans l'organisation de ses obsèques et le vécu de son deuil. «Pour certains, il est donc inenvisageable d'allier l'expression d'émotions liées à un moment joyeux à un temps d'hommage, poursuit-elle. Sans oublier la peur du qu'en-dira-t-on. Quand les pompes funèbres proposent aux personnes organisant des obsèques quelque chose qui sort des sentiers battus, il est très fréquent qu'on leur réponde “ça ne se fait pas”, ou que l'on se demande ce que vont penser les gens.» Mais selon Sarah Dumont, peu importent les jugements. «Quand on est juste, que l'on respecte l'ordre public et que l'hommage est en corrélation avec la personnalité du défunt, tout est permis.»

(1) Dominique Picard est spécialiste des relations sociales, auteure de plusieurs ouvrages sur le sujet.

Publié dans Blog de Deuil

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